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Gaspard-Marie Janvier, Le dernier dimanche, Mille et une nuits, 2009, 15 €.
Qu’un roman célèbre le rendez-vous hebdomadaire de la messe dominicale : voilà qui est peu banal !
Que dimanche après dimanche il en déploie sans prêchi-prêcha l’étonnante fécondité se nourrissant de ses ouvertures comme de ses petitesses : voilà qui mérite attention !
Que ce livre soit signé de la main d’un laïc, non sans lettres, mais au ras de la vie, aux prises avec les résistances de sa pauvre humanité, voilà qui le rend accessible à tous !
Qu’il le fasse de façon aussi profonde et enjouée, relevant au passage l’absurdité des sophismes qui parasitent l’écoute pour se faire l’écho d’un pasteur qui nous ouvre à l’intelligence des Écritures lorsqu’il nous parle au cœur !…
et qu’il mette autant de liberté de pensée à dénoncer les veaux d’or qui se disputent notre fidélité que de bienveillance souriante à l’égard de ceux qui se rendent à la messe sans conscience du ridicule ou du sans-gêne qui découragent autour d’eux les plus faibles dans leur foi, voilà qui le rend sympathique !
Qu’il dénonce, chemin faisant, les étroitesses ou les ressentiments qui nous guettent tous et nous en voilent les richesses cachées : voilà qui nous invite à la conversion !
Qu’il le fasse en de brefs chapitres qui peuvent se lire et se relire si joyeusement : voilà qui ôte tout prétexte à notre bonne volonté fatiguée !
Qu’à travers tout cela se dessine en filigrane le travail de la grâce et l’itinéraire d’une conversion aux accents autobiographiques d’un homme rendu, certes, disponible par son divorce, mais brisé par l’absence de sa « chair disparue », voilà qui achève de rendre sa lecture si attachante et finalement si poignante…
Une œuvre tout en finesse donc… qui est aussi un discret mais vibrant hommage à la Miséricorde et à ses relevailles.
Quelques extraits pour ceux qui en douteraient ?
« Sortons dans la rue, ouvrons le journal, regardons cette nature basse livrée à elle-même dans son désespoir ou son absurdité. La force du christianisme, avec ses discours, ses images et ses rites, c’est de nous assurer par tous les moyens qu’il existe un autre régime d’être, un régime élevé, tourné métaphoriquement vers le ciel, où le mot « vie » prend une signification qui ne l’oppose plus à la mort. Le pari est là : ne pas ignorer la nature basse, mais ne jamais s’y abandonner ; s’en servir pour atteindre la nature haute, comme la plante puise dans le sol pour opérer son ascension. Par quel moyen ? »… Je vous laisse le découvrir ! ‘_’ !
« Le Christianisme est décidément une école de sagesse, de patience et d’humour, fabriquant des anticorps à chacune des pathologies qu’il secrète. Ainsi ce père la Renfrogne, débitant son prêche à la vitesse d’une kalachnikov, n’applique-t-il pas charitablement l’adage selon lequel un prédicateur ennuyeux doit ennuyer le moins longtemps possible ? »
En contrepoint, « le père Joris, c’est comme quelqu’un avec qui j’entretiendrais une correspondance. Je le retrouve le dimanche sans l’avoir vu ni lui avoir parlé depuis une semaine, mais il me prend là où j’ai avancé et répond aux inquiétudes nées de six journées d’exercice du monde. […] c’est alors que le père Joris me souffle les mots à leur intention : « Telle est bien la folie de l’amour qui ne s’accomplit que désarmé !… Désarmé comme le Christ-roi sur le poteau du supplice, et qui n’a plus que son amour à offrir à l’humanité. »