Vous serez saints, car moi, je suis saint



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« Le Seigneur […] veut que nous soyons saints et il n’attend pas de nous que nous nous contentions d’une existence médiocre, édulcorée, sans consistance. En réalité, dès les premières pages de la Bible, il y a, sous diverses formes, l’appel à la sainteté. »

Pape François, Gaudete et Exultate 1

Et si nous allions voir dans la Bible ce que veut dire « saint » ? Qu’est-ce que la sainteté selon la Bible ?

La sainteté dans l’Ancien Testament

« Toi, tu es saint, toi qui habites les hymnes d’Israël » (Ps 21, 4)

La Bible fait de la sainteté une caractéristique avant tout de Dieu lui-même : « Exaltez le Seigneur notre Dieu, prosternez-vous devant sa sainte montagne, car il est saint, le Seigneur notre Dieu » (Ps 98, 9). C’est même parfois le Nom de Dieu lui-même : « La joie de notre cœur vient de lui, notre confiance est dans son nom très saint. » (Ps 32, 21).
Pour parler du saint, le mot hébreu utilisé dans la Bible est qodesh. Il pourrait dériver d’une racine signifiant « couper, séparer », et désigner une mise à l’écart, comme à l’origine du mot « sacré ». La notion de sacré ou de pur que l’on trouve dans les religions naturelles, porte en elle une idée de séparation du profane, et de frayeur mêlée de fascination. Car le sacré est alors lié à une force qui nous dépasse. Celle-ci peut être bénéfique ou dangereuse, ou les deux à la fois, et elle s’impose à l’homme. On n’approche pas ce qui est sacré, ou seulement avec beaucoup de précautions.
Il y a bien une certaine inaccessibilité de Dieu dans la Bible. Lors de sa manifestation au Sinaï, au moment de conclure l’Alliance, la sainteté de Dieu est effrayante pour le peuple. « Le Seigneur dit encore à Moïse : ‘Va vers le peuple ; sanctifie-le, aujourd’hui et demain ; qu’ils lavent leurs vêtements, pour être prêts le troisième jour ; car, ce troisième jour, en présence de tout le peuple, le Seigneur descendra sur la montagne du Sinaï. Fixe des limites au peuple, en leur disant : Gardez-vous de gravir la montagne et d’en toucher le bord ! Quiconque touchera la montagne sera mis à mort !’ […] Le troisième jour, dès le matin, il y eut des coups de tonnerre, des éclairs, une lourde nuée sur la montagne, et une puissante sonnerie de cor ; dans le camp, tout le peuple trembla. » (Ex 19, 10-12.16). Le peuple préfère donc se tenir à distance de la sainteté de Dieu : « Tout le peuple voyait les éclairs, les coups de tonnerre, la sonnerie du cor et la montagne fumante. Le peuple voyait : ils frémirent et se tinrent à distance. Ils dirent à Moïse : ‘Toi, parle-nous, et nous écouterons ; mais que Dieu ne nous parle pas, car ce serait notre mort’. » (Ex 20, 18-19)
Les psalmistes chantent sa grandeur : « Qui est comme toi parmi les dieux, Seigneur ? Qui est comme toi, magnifique en sainteté, terrible en ses exploits, auteur de prodiges ? » (Ex 15, 11). « Adorez le Seigneur, éblouissant de sainteté : tremblez devant lui, terre entière. » (Ps 95, 9). Et quand Dieu se révèle au prophète Isaïe dans le Temple dans sa majesté, même les séraphins ne sont pas dignes de voir sa Face (cf. Is 6, 1-5).
Mais la réalité biblique va bien plus loin que le sacré païen. Dieu se fait proche de son peuple. Cette proximité est même une caractéristique du Dieu des Hébreux : « Quelle est en effet la grande nation dont les dieux soient aussi proches que le Seigneur notre Dieu est proche de nous chaque fois que nous l’invoquons ? » (Dt 4, 7) C’est pourquoi dans un dialogue d’ami à ami, Moïse peut dire au Seigneur : « À quoi donc reconnaître que moi j’ai trouvé grâce à tes yeux – et ton peuple également ? N’est-ce pas au fait que tu marcheras avec nous ? Ainsi, moi et ton peuple, nous serons différents de tous les peuples de la terre. » (Ex 33, 16)
Parce qu’il est saint, Dieu vient sauver son peuple : « Mais maintenant, ainsi parle le Seigneur, lui qui t’a créé, Jacob, et t’a façonné, Israël : Ne crains pas, car je t’ai racheté, je t’ai appelé par ton nom, tu es à moi. Quand tu traverseras les eaux, je serai avec toi, les fleuves ne te submergeront pas. Quand tu marcheras au milieu du feu, tu ne te brûleras pas, la flamme ne te consumera pas. Car je suis le Seigneur ton Dieu, le Saint d’Israël, ton Sauveur. » (Is 43, 1-3)
Cette proximité de Dieu rend sa sainteté exaltante. Elle est une bonne nouvelle pour l’homme. Elle inspire la confiance, car elle est bonté : « Seigneur, depuis les temps anciens, n’es-tu pas mon Dieu, mon saint, toi qui es immortel ? » (Ha 1, 12). Et en s’approchant du peuple qu’il a choisi, le Dieu saint rend ce peuple différent. Il le sanctifie.

« Vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte » (Ex 19, 6)

Le Dieu saint se révèle à l’homme, et il révèle sa sainteté dans ce qu’il fait pour son peuple. « Je n’agirai pas selon l’ardeur de ma colère, je ne détruirai plus Israël, car moi, je suis Dieu, et non pas homme : au milieu de vous je suis le Dieu saint, et je ne viens pas pour exterminer. » (Os 11, 9) L’homme va pouvoir s’approcher de la sainteté divine, avec humilité. Ainsi Dieu dit à Moïse depuis le buisson ardent : « N’approche pas d’ici ! Retire les sandales de tes pieds, car le lieu où tu te tiens est une terre sainte ! » (Ex 3, 5).
Contrairement au sacré païen, la sainteté de Dieu inspire donc le respect sans faire peur. Elle est même attirante. L’homme biblique est en relation avec son Dieu qui est bon, et qui veut le bien de l’homme. La sainteté qui émane de lui pénètre le monde pour rayonner sur l’homme. Elle est quelque chose de la nature de Dieu qui se communique aux hommes et appelle au respect, à la contemplation, à la confiance, à la ressemblance avec lui. Dieu veut être reconnu saint, pour sanctifier son peuple : « Soyez saints pour moi, car moi, le Seigneur, je suis saint, et je vous ai mis à part d’entre les peuples pour que vous soyez à moi. » (Lv 20, 26).
Le peuple est saint, non par sa propre initiative, mais parce que Dieu marche avec lui, parce qu’il appartient à Dieu. Le signe de cette appartenance, de cette Alliance, c’est la Loi, qu’il doit accomplir pour être sanctifié : « Toi, tu parleras ainsi aux fils d’Israël : Surtout, vous observerez mes sabbats, car c’est un signe entre moi et vous, de génération en génération, pour qu’on reconnaisse que je suis le Seigneur, celui qui vous sanctifie. » (Ex 31, 13) C’est par libre choix de Dieu que le peuple est sanctifié : « Ainsi parle le Seigneur, rédempteur et saint d’Israël, au serviteur méprisé, détesté par les nations, esclave des puissants : Les rois verront, ils se lèveront, les grands se prosterneront, à cause du Seigneur qui est fidèle, du Saint d’Israël qui t’a choisi. » (Is 49, 7)

« Sanctifiez-vous et soyez saints, car je suis le Seigneur votre Dieu. » (Lv 20, 7)

Le peuple est appelé à répondre au choix de son Dieu en se sanctifiant, pour correspondre au projet d’amour que Dieu a pour lui. Le culte, les rites, servent à cette sanctification en même temps qu’à manifester la sainteté de Dieu. En Ex 19,10, cité plus haut, le Seigneur appelle à la sanctification avant les interventions de Dieu.
Mais le culte, manifestation de l’Alliance, doit déboucher sur une vie selon les commandements de l’Alliance. « Vous garderez mes commandements et les mettrez en pratique. Je suis le Seigneur. Vous ne profanerez pas mon saint nom, afin que je sois sanctifié au milieu des fils d’Israël ; je suis le Seigneur qui vous sanctifie. Moi qui vous ai fait sortir du pays d’Égypte pour être votre Dieu, je suis le Seigneur. » (Lv 22, 31-33)
Les prophètes ne cessent de rappeler que le culte n’est pas suffisant en lui-même pour sanctifier. Le culte doit conduire à une obéissance à la Parole du Seigneur. Ainsi, le prophète Osée proclame au nom du Seigneur : « Je veux la fidélité, non le sacrifice, la connaissance de Dieu plus que les holocaustes. » (Os 6, 6). Et plus loin : « Revenez au Seigneur en lui présentant ces paroles : ‘Enlève toutes les fautes, et accepte ce qui est bon. Au lieu de taureaux, nous t’offrons en sacrifice les paroles de nos lèvres’. » (Os 14, 3)
Le prophète Jérémie se saisit fortement de ce message. Il dénonce l’infidélité du peuple qui risque de causer sa ruine. Le peuple met sa confiance dans le fait que le Seigneur réside dans le Temple de Jérusalem, mais ça n’est pas suffisant : « Ainsi parle le Seigneur de l’univers, le Dieu d’Israël : Rendez meilleurs vos chemins et vos actes : je vous ferai demeurer dans ce lieu. Ne faites pas confiance à des paroles de mensonge, en disant : ‘Temple du Seigneur ! Temple du Seigneur ! C’est ici le Temple du Seigneur !’ » (Jr 7, 3-4) Puis il appelle à la conversion en actes, car sans cette unité de vie, les sacrifices ne servent à rien (Jr 7, 21-23).

La sainteté dans le Nouveau Testament

Au seuil du Nouveau Testament, Dieu vient dans le monde par le Verbe, le Fils unique du Père saint, qui assume notre chair (Jn 1, 1.14 ; cf. 17, 11). Sur lui repose l’Esprit Saint, pour nous le transmettre. Jean-Baptiste témoigne avoir entendu : « Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et demeurer, celui-là baptise dans l’Esprit Saint. » (Jn 1, 32-33). Après sa résurrection, Jésus donne son Esprit Saint aux disciples, d’abord lorsqu’il souffle sur les Apôtres au cénacle (Jn 20, 22), puis à tous les disciples le jour de la Pentecôte (Ac 2, 4), afin de les rendre participants de sa sainteté. Et ce don de l’Esprit à l’Église se renouvelle jusqu’à aujourd’hui.

« celui qui va naître sera saint, il sera appelé Fils de Dieu. » (Lc 1, 35)

Au moment de l’Annonciation, l’ange dit à Marie qui le questionne : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi celui qui va naître sera saint, il sera appelé Fils de Dieu. » (Lc 1, 35) Dès sa conception, Jésus est affirmé dans sa divinité par sa condition sainte de Fils de Dieu. Il vient sur terre par l’Esprit Saint (cf Mt 1, 18). Désormais la sainteté n’est plus séparée de la terre, mais elle s’est incarnée. Le Puissant, le Dieu saint, fait des merveilles pour Marie et toute l’humanité (Lc 1, 49).
La sainteté de Jésus est liée à la filiation divine et à la présence en lui de l’Esprit Saint, qui se manifeste notamment au moment du baptême dans le Jourdain (Lc 3, 22 et Ac 10, 38). C’est le même Esprit qui le conduit dans sa mission (Lc 4, 1.18). Il lutte contre le démon, qui ne résiste pas à sa sainteté. Les démons qu’il chasse le reconnaissent comme saint (Mc 1, 24 ; 3, 11). De même ses apôtres, à la vue de ses miracles, notamment celui de la multiplication des pains qui rappelle le grand miracle de la manne dans le désert (Jn 6, 69).

« Par son unique offrande, il a mené pour toujours à leur perfection ceux qu’il sanctifie. » (He 10, 14)

Lors du dernier repas avec ses Apôtres, Jésus annonce l’envoi du Paraclet, de l’Esprit Saint : « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : l’Esprit de vérité, lui que le monde ne peut recevoir, car il ne le voit pas et ne le connaît pas ; vous, vous le connaissez, car il demeure auprès de vous, et il sera en vous. » (Jn 14, 15-17). Puis dans sa dernière prière au Père, dite « sacerdotale », il lui demande leur sanctification : « Ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi, je n’appartiens pas au monde. Sanctifie-les dans la vérité : ta parole est vérité. De même que tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde. Et pour eux je me sanctifie moi-même, afin qu’ils soient, eux aussi, sanctifiés dans la vérité. » (Jn 17, 16-19).
Au moment de sa mort, lorsque Jésus expire, il remet son esprit à son Père (Mt 27, 50 ; Mc 15, 37 ; Lc 23, 46). C’est alors qu’à ce moment-même, le rideau du sanctuaire (le saint des saints) se déchire (Mt 27,51 ; Mc 15, 38). La séparation entre la sainteté de Dieu et le monde des hommes est abolie, non en une profanation du saint, mais pour la sanctification du monde.
C’est ainsi qu’est accomplie par le Christ la véritable sanctification de l’humanité, comme l’explique la lettre aux Hébreux. « En entrant dans le monde, le Christ dit : Tu n’as voulu ni sacrifice ni offrande, mais tu m’as formé un corps. Tu n’as pas agréé les holocaustes ni les sacrifices pour le péché ; alors, j’ai dit : Me voici, je suis venu, mon Dieu, pour faire ta volonté, ainsi qu’il est écrit de moi dans le Livre. Le Christ commence donc par dire : Tu n’as pas voulu ni agréé les sacrifices et les offrandes, les holocaustes et les sacrifices pour le péché, ceux que la Loi prescrit d’offrir. Puis il déclare : Me voici, je suis venu pour faire ta volonté. Ainsi, il supprime le premier état de choses pour établir le second. Et c’est grâce à cette volonté que nous sommes sanctifiés, par l’offrande que Jésus-Christ a faite de son corps, une fois pour toutes. » (He 10, 5-10)

« Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : ‘Recevez l’Esprit Saint’. » (Jn 20, 22)

Jésus ressuscité se fait reconnaître de ses disciples et leur transmet l’Esprit Saint pour la sanctification du monde : « Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : ‘Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus.’ » (Jn 20, 22-23).
La venue de l’Esprit s’accomplit de même lors de la fête de Pentecôte dans le lieu où étaient rassemblés les disciples. « Alors leur apparurent des langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa une sur chacun d’eux. Tous furent remplis d’Esprit Saint : ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit. » (Ac 2, 3-4) Par l’action de l’Esprit, les disciples se mettent donc à témoigner du salut apporté en Jésus-Christ pour que tous ceux qui les entendent puissent y accorder leur foi.
Plus tard, la sanctification dans l’Esprit atteint les païens, dans la maison du centurion Corneille : « Pierre parlait encore quand l’Esprit Saint descendit sur tous ceux qui écoutaient la Parole. Les croyants qui accompagnaient Pierre, et qui étaient juifs d’origine, furent stupéfaits de voir que, même sur les nations, le don de l’Esprit Saint avait été répandu. En effet, on les entendait parler en langues et chanter la grandeur de Dieu. Pierre dit alors : ‘Quelqu’un peut-il refuser l’eau du baptême à ces gens qui ont reçu l’Esprit Saint tout comme nous ?’ » (Ac 10, 44-47) Le baptême devient le lieu, le moyen par lequel ceux qui mettent leur foi dans le Christ et sa parole vont être sanctifiés. Ils y reçoivent la grâce de pouvoir vivre selon la sainteté de Dieu.

« ceux qui ont été sanctifiés dans le Christ Jésus » (Ph 1, 1)

Les saints deviennent les chrétiens. Lorsque Paul écrit pour la première fois aux Corinthiens, il écrit « à ceux qui ont été sanctifiés dans le Christ Jésus et sont appelés à être saints avec ceux qui en tout lieu, invoquent le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, leur Seigneur et le nôtre. » (1 Co 1, 2) Puis, après un appel à l’unité et un rappel que c’est par la sagesse de la Croix du Seigneur que nous sommes sauvés, il conclut : « C’est grâce à Dieu en effet que vous êtes dans le Christ Jésus, lui qui est devenu pour nous sagesse venant de Dieu, justice, sanctification, rédemption. » (1, 30). La sainteté devient donc la caractéristique des disciples de Jésus habités par l’Esprit Saint. Ils sont à la fois sanctifiés et « appelés à être saints » (Rm 1, 7).
La sainteté est une grâce qui nous arrive par le Christ. Dieu « nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l’amour. » (Eph 1, 4) Paul ajoute plus loin : « vous n’êtes plus des étrangers ni des gens de passage, vous êtes concitoyens des saints, vous êtes membres de la famille de Dieu » (2, 19). Le Christ a en effet « aimé l’Église, il s’est livré pour elle, afin de la rendre sainte par le bain de l’eau baptismale, accompagné d’une parole. » (5, 25-26). Par le baptême, les chrétiens participent donc à la sainteté du Christ. Ils deviennent « une demeure de Dieu par l’Esprit Saint » (2, 22), un « sanctuaire de Dieu » (1 Co 3, 16).
Saint Paul en arrive à appeler les fidèles du nom de « saints » (Rm 15, 25 ; 16, 2 ; 2 Co 1, 1 ; 13, 12). De même saint Jean, dans le livre de l’Apocalypse, appelle-t-il très couramment les fidèles les « saints », comme dans ce passage : « C’est ici qu’on reconnaît la persévérance des saints, ceux-là qui gardent les commandements de Dieu et la foi de Jésus. » (Ap 14, 12)

« à l’exemple du Dieu saint qui vous a appelés, devenez saints » (1 P 1, 15)

Le Salut apporté par le Christ rend donc les chrétiens participants de la sainteté de Dieu, et capables de correspondre à cette sainteté : « Dans la joie, vous rendrez grâce à Dieu le Père, qui vous a rendus capables d’avoir part à l’héritage des saints, dans la lumière. » (Col 1, 12). Cela nécessite néanmoins de la part des fidèles d’accueillir cette grâce et d’y tenir, de la laisser se déployer dans le concret de la vie : « Maintenant, Dieu vous a réconciliés avec lui, dans le corps du Christ, son corps de chair, par sa mort, afin de vous introduire en sa présence, saints, immaculés, irréprochables. Cela se réalise si vous tenez fermement fondés dans la foi, sans vous détourner de l’espérance que vous avez reçue en écoutant l’Évangile proclamé à toute créature sous le ciel. » (Col 1, 22-23)
Ceux qui sont élus pour être saints ont à choisir cette voie de la sainteté et à renoncer à toutes les convoitises de ce monde : « Comme des enfants qui obéissent, cessez de vous conformer aux convoitises d’autrefois, quand vous étiez dans l’ignorance, mais, à l’exemple du Dieu saint qui vous a appelés, devenez saints, vous aussi, dans toute votre conduite, puisqu’il est écrit : Vous serez saints, car moi, je suis saint. » (1 P 1, 14-16) C’est répondre à l’appel du Christ à la conversion, et mettre sa fierté dans une conscience pure, en vivant selon Dieu et non selon les logiques de ce monde (cf. 2 Co 1, 12)
C’est pourquoi saint Paul ne cesse de rappeler l’exigence de mener une vie sainte. « La volonté de Dieu, c’est que vous viviez dans la sainteté, en vous abstenant de la débauche, et en veillant chacun à rester maître de son corps dans un esprit de sainteté et de respect, sans vous laisser entraîner par la convoitise comme font les païens qui ne connaissent pas Dieu. » (1 Th 4, 3-5)
L’Apôtre des Nations présente de beaucoup de manières le combat entre les œuvres de la chair et celles de l’Esprit. La chair désigne pour lui la faiblesse de notre humanité limitée et blessée par le péché. Elle fait agir selon une logique qui va vers la mort et non la vie. Il faut adopter une manière d’agir selon la motion de l’Esprit pour en porter les fruits (cf Ga 5, 16-25). « Vous aviez mis les membres de votre corps au service de l’impureté et du désordre, ce qui mène au désordre ; de la même manière, mettez-les à présent au service de la justice, ce qui mène à la sainteté. » (Rm 6, 19)
Cette nouvelle manière d’agir est le vrai culte rendu à Dieu, le véritable sacrifice dans l’Esprit auquel les saints sont appelés. « Je vous exhorte donc, frères, par la tendresse de Dieu, à lui présenter votre corps – votre personne tout entière –, en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu : c’est là, pour vous, la juste manière de lui rendre un culte. Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui est parfait. » (Rm 12, 1)

« Demandons à l’Esprit Saint d’infuser en nous un intense désir d’être saint pour la plus grande gloire de Dieu et aidons-nous les uns les autres dans cet effort. Ainsi, nous partagerons un bonheur que le monde ne pourra nous enlever. »

Pape François, Gaudete et exultate 177