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Vivre ensemble cloîtrés



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Un peu de sagesse bénédictine pour vivre ensemble cloîtrés ?

Saint Benoît a écrit sa Règle pour « la si puissante catégorie des cénobites », c’est à dire des moines « qui ‘monasteriale’ combattent sous une règle et un abbé » (RB 1, 13 et 2). Ce ‘monasteriale’ peut être traduit à la fois par « vivent en commun » et par « dans un monastère ». Il s’agit donc de vivre ensemble cloîtrés dans une même maison de manière stable. L’idée revient à la fin du chapitre consacré aux « instruments pour bien agir » : « Or l’atelier où nous devons travailler diligemment avec tous ces instruments, c’est le cloître du monastère avec la stabilité dans la communauté. » (4, 78). Et le chapitre sur le portier ajoute : « Le monastère doit, autant que possible, être disposé de telle sorte que l’on y trouve tout le nécessaire : de l’eau, un moulin, un jardin et des ateliers pour qu’on puisse pratiquer les divers métiers à l’intérieur de la clôture. De la sorte les moines n’auront pas besoin de se disperser au-dehors, ce qui n’est pas du tout avantageux pour leurs âmes. » (RB 66, 6-7). Vivre ensemble cloîtrés a donc une valeur très positive pour Saint Benoît, et il y a beaucoup à y gagner ! Ceci dit, on gagne au prix d’un combat, ou au moins par l’exercice d’un art : ça ne se fait donc pas tout seul !
Les moines bénédictins ont la chance de tous être des volontaires pour ce genre de vie. Ils sont même testés à l’entrée : « On n’accordera pas facilement l’entrée à celui qui vient s’y engager dans la vie religieuse; mais on fera ce que dit l’Apôtre : ‘Éprouvez les esprits pour discerner s’ils sont de Dieu.’ » (58, 1-2). Ce qu’on teste, c’est la persévérance dans les difficultés, qui manifeste la fermeté de la décision du postulant. En revanche, cette communauté a ceci de particulier que les membres ne se sont pas vraiment choisi, et/ou n’ont pas grandi ensemble comme dans une famille. Et, effectivement, dans le texte de la Règle on trouve la trace d’une grande diversité de personnalités et d’éducations qu’il ne devait pas être facile de faire cohabiter. Alors qu’est-ce que Saint Benoît met donc en place pour permettre à tous de vivre ensemble cloîtrés ?
Une méditation, du théorique au pratique, en trois étapes : VIVRE / ENSEMBLE / CLOÎTRÉS

I – « VIVRE » ensemble cloîtrés

D’abord il s’agit de vivre… c’est tout de même important ! Mais quelle conception St Benoît a-t-il de la vie ? La manière d’envisager la vie et la manière d’organiser son mode de vie sont bien entendus intimement liés. Organiser une vie cloîtrée en communauté trahit une approche des buts de la vie. Et si l’on est contraint de vivre cloîtré, peut-être est-ce une bonne occasion de s’interroger sur les buts de sa vie habituelle.

Vie cloîtrée : le bonheur prend du relief

La première fois qu’on voit le thème de la vie apparaître dans la Règle, c’est dans un conseil et un appel de Dieu lui-même. St Benoît met en scène la Parole de Dieu qui s’adresse à nous pour que nous l’écoutions : « Courez pendant que vous avez la lumière de la vie, de peur que les ténèbres de la mort ne vous saisissent. (cf. Jn 12, 35). Le Seigneur, cherchant son ouvrier dans la foule du peuple à laquelle il crie, dit encore : ‘Quel est l’homme qui veut la vie et désire voir des jours heureux ?’ (Ps 33, 13) » (Prologue 13-15). Il s’agit donc de choisir la vie et le bonheur. Tout ne s’arrête pas quand on est cloîtré, au contraire, le Seigneur nous invite à « courir ». Mais alors, courir vers où et comment ? La réponse vient juste après : « si, à cette demande, tu lui réponds : ‘C’est moi’, Dieu te réplique : ‘Si tu veux avoir la vie véritable et éternelle, interdis le mal à ta langue et à tes lèvres toute parole trompeuse; détourne-toi du mal et fais le bien; cherche la paix avec ardeur et persévérance.’ (Ps 33, 14.15) » (Pr 16.17) Tout un programme pour une vie qui prend du relief : en arrière-fond se profile le chemin de la vie éternelle qui commence dès ici-bas dans la vérité, le bien, la paix intérieure. Goûtez-vous cet appel ? Car, « quoi de plus doux, frères très chers, que cette voix du Seigneur qui nous invite ? Voyez comme le Seigneur lui-même, dans sa bonté, nous montre le chemin de la vie. Ceignons donc nos reins de la foi et de la pratique des bonnes œuvres ; sous la conduite de l’Évangile, avançons dans ses chemins, afin de mériter de voir Celui qui nous a appelés dans son royaume. (cf. Eph 6, 14.15 ; Lc 12, 35 ; 1 Th 2, 12) » (Pr 19-21)
Il y a donc deux vies en une, et St Benoît nous invite à ne pas nous tromper de but final dans nos nécessités immédiates. C’est un peu comme quand on marche en montagne : garder les yeux sur le sommet à atteindre (même si parfois il disparaît temporairement) pour donner du sens à chaque pas, à chaque passage un peu délicat, ou pour ne pas s’arrêter en cours de route sur un chemin facile mais qui se perd dans la forêt et aboutit dans un ravin. « S’il prolonge comme une trêve les jours de notre vie, c’est pour l’amendement de ce qui est mauvais, selon cette parole de l’Apôtre : ‘Ignores-tu que la patience de Dieu te convie à changer de vie ?’ (Rm 2, 4). Car ce doux Seigneur affirme : ‘Je ne veux pas la mort du pécheur, mais qu’il se convertisse et qu’il vive.’ (Ez 33, 11) » (Pr 36-38). La vie éternelle donne donc sens à cette vie, et nous oriente sur la manière d’occuper note temps : « si, désireux d’éviter les peines de l’enfer, nous voulons parvenir à la vie éternelle, tandis qu’il en est temps encore et que nous sommes en ce corps et que nous pouvons accomplir tout cela à la lumière de cette vie, courons et faisons, dès ce moment, ce qui nous profitera pour toute l’éternité. » (Pr 42-44) : remarquez bien encore une fois que le temps n’est pas arrêté quand on est cloîtré. Au contraire, il presse, et il s’agit de courir. On court beaucoup dans le Prologue de la Règle de Saint Benoît ! Normal : la vie, c’est quand ça bouge.

La vie : des désirs et des contrariétés…

Le dynamisme de la vie, c’est beaucoup une question de désir. St Benoît est un homme de cœur, et il est donc très attentif aux désirs qui habitent le cœur de l’homme. Il y en a de toutes sortes. La vie cloîtrée les fait ressortir. Il s’agit donc de se les gérer, et de faire le tri, de prendre soin de sa vie intérieure.
Parmi une longue liste de conseils spirituels express, appelés « instruments pour bien agir », on en trouve trois intéressants pour faire la transition entre le thème précédent et celui-ci : « Désirer la vie éternelle de toute l’ardeur spirituelle. » Le désir fondamental est donc à orienter vers le but final. « Avoir chaque jour la menace de la mort devant les yeux. » Se souvenir de la mort n’est pas avoir des pensées morbides, mais penser que cette vie à une fin, et donc la vivre à plein dès maintenant, dans son essentiel. « Veiller à toute heure sur les actions de sa vie. » (4, 46-48). La possible brièveté de cette vie implique de faire attention à ce qu’on fait, non par peur, mais pour décider librement de ce que je veux vraiment vivre, et en profiter.
La force du désir peut être très puissante en nous. Au chapitre suivant, qui traite de l’obéissance, il y a une montée d’intensité : « Ainsi agissent ceux qui aspirent ardemment à la vie éternelle. C’est pour cela qu’ils entrent dans la voie étroite dont parle le Seigneur, lorsqu’il dit : ‘Étroite est la voie qui conduit à la vie.’ (Mt 7, 14) Aussi, ne vivant plus à leur gré et n’obéissant plus à leurs désirs ni à leurs inclinations, ils marchent au jugement et au commandement d’autrui, et désirent se soumettre à un abbé en vivant dans un monastère. » (5, 10-12) La charge principale de l’abbé est d’annoncer l’Évangile et de le faire vivre ensemble à toute la communauté. Quant à la vie cloîtrée dans le monastère, elle limite les échappatoires inutiles : c’est une autoroute, ça file et il n’y a pas beaucoup de sorties. Mais attention aux sorties de route : elles peuvent être fatales !
Pourquoi en viendrait-on à des sorties de routes ? Parce que nos désirs nous tirent et nous poussent dans tous les sens… La vie monastique cloîtrée, comme toute vie, ne manque pas de contrariétés et de frustrations qu’il faut assumer pour avancer sans danger. St Benoît nous prévient dès la fin du Prologue : « nous voulons fonder une école où l’on serve le Seigneur. Dans cette institution, nous espérons ne rien établir de rude ni de pesant. Si, toutefois, il s’y rencontrait quelque chose d’un peu rigoureux, qui fût imposé par l’équité pour corriger nos vices et sauvegarder la charité, garde-toi bien, sous l’effet d’une crainte subite, de quitter la voie du salut dont les débuts sont toujours difficiles. » (Pr 45-48). Nous verrons plus loin comment St Benoît essaie effectivement d’éviter les difficultés. Mais certaines font tout de même partie de la vie. Elles ont l’avantage de nous forcer à nous dépasser. Ainsi les épreuves font travailler le cœur spirituel pour le renforcer. C’est pourquoi le texte continue : « En effet, à mesure que l’on progresse dans la voie religieuse et dans la foi, le cœur se dilate, et l’on court dans la voie des commandements de Dieu, avec la douceur ineffable de l’amour. Ne nous écartons donc jamais de son enseignement, et persévérant jusqu’à la mort dans sa doctrine au sein du monastère, participons par la patience aux souffrances du Christ pour mériter d’avoir part à son royaume. » (Pr 49.50).
Tout cela nécessite une garde du cœur, une écologie des désirs, sur laquelle il y aurait beaucoup à dire. Mais ce sera l’occasion d’un autre article. En tout cas, face aux difficultés de gestion de l’intériorité, quelques « instruments pour bien agir » sont précieux : « Ne rien préférer à l’amour du Christ » (4, 21) ; « Ne pas accomplir les désirs de la chair. (Ga 5, 16) » (4, 59) : il ne s’agit pas ici de sexualité mais de tout ce qui nous tire vers le bas ; « Ne pas vouloir être appelé saint avant de l’être, mais le devenir d’abord, alors on le sera appelé avec plus de vérité. » (4, 62) : très important ; et le plus important : « Ne jamais désespérer de la miséricorde de Dieu. » (4, 74). Je vous laisse aller voir les autres conseils !

Retrousser ses manches

Pour bien vivre, il faut donc se retrousser les manches ! Nous avons déjà vu que le monastère était comme une « école », ou un « atelier » dans lequel il convient de « travailler diligemment » (4, 78). On ne s’y tourne pas les pouces ! À propos des instruments de l’art spirituel, St Benoît conclut : « Voici quels sont les instruments de l’art spirituel. Si, jour et nuit, sans relâche, nous nous en servons, quand, au jour du jugement, nous les remettrons, le Seigneur nous donnera la récompense qu’il a promise lui-même : ‘Ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment.’ (1 Co 2, 9) » (4, 75-77). La vie spirituelle, c’est du concret ! Il est nécessaire de mettre en œuvre : « le Seigneur attend de nous que nous répondions chaque jour par nos œuvres à ses saintes leçons. » (Pr 35) Faire des choix, prendre des décisions, poser des actes : les bonnes intentions ne suffisent pas.
Ajoutons que toute la personne est investie. Par exemple, dans le chemin de l’humilité, qui est, avec l’obéissance, l’autoroute bénédictine vers le Ciel, tout l’être est impliqué : « Si donc, mes frères, nous voulons atteindre au sommet de l’humilité parfaite, et parvenir rapidement à cette hauteur céleste, à laquelle on monte par l’humilité dans la vie présente, il nous faut monter et dresser par nos actions cette échelle qui apparut en songe à Jacob. […] L’échelle en question, c’est notre vie en ce monde, que le Seigneur dresse vers le Ciel, si notre cœur s’humilie. Les côtés de cette échelle figurent notre corps et notre âme. » (7, 5.6.8). Corps et âme, cela veut dire toutes les potentialités de la personne, des plus charnelles aux plus spirituelles en embarquant au passage toute la complexité de notre psychisme.
On n’aime gère aujourd’hui parler de « mériter » la vie éternelle. Il est vrai qu’on ne mérite rien. Cependant on reconnaît l’arbre à ses fruits, et St Benoît fait souvent appel au mérite de la vie des frères (21,4 ; 32,1 ; 61,5.12 ; 62,6 ; 63,1 ; 64,2), en particulier de ceux à qui il convient de confier des responsabilités. Pourtant St Benoît n’oublie pas que la vie est d’abord à recevoir, et qu’il s’agit de tendre les mains vers Dieu.

Une vie à recevoir

« Avant tout, demande-lui par une très instante prière qu’il mène à bonne fin tout bien que tu entreprennes » (Pr 4) affirme St Benoît au tout début du prologue. « Avant tout » : c’est clair, la vie à recevoir de Dieu passe en premier. Et le thème revient vers la fin du prologue, comme pour l’enchâsser dans cette idée majeure, qui équilibre l’affirmation de la nécessaire implication de la personne : « Il nous faut donc préparer nos cœurs et nos corps aux combats de la sainte obéissance à ses commandements. Quant à ce qui manque en nous aux forces de la nature, prions le Seigneur d’ordonner à sa grâce de nous prêter son aide. » (Pr 40.41). On n’est donc pas tout seul, Dieu nous précède sur le chemin.
C’est aussi à la base de notre engagement, puisque juste après avoir écrit et signé sa charte d’engagement, et l’avoir placée sur l’autel, le frère « entonnera aussitôt ce verset : ‘Reçois-moi, Seigneur, selon ta parole, et je vivrai, et ne me confonds pas dans mon attente.’ (Ps 118,116) Toute la communauté répétera trois fois ce verset, et conclura par le Gloria Patri. Le novice se prosternera alors aux pieds de chacun des frères, afin qu’ils prient pour lui. » (58,21-23). Le dynamisme de la vie monastique se fonde donc sur l’énergie que l’on reçoit de Dieu et de la prière de ses frères. L’espérance d’être reçu dans les bras de Dieu, selon sa Parole, ouvre le moine à la vie. C’est pourquoi il essaie de vivre au maximum en sa présence. Et c’est le Christ lui-même qui « nous [amènera] tous ensemble à la vie éternelle » (cf 72,12)

II – Vivre « ENSEMBLE » cloîtrés

Chez St Benoît, on fait les choses ensemble. Et selon la dernière citation mentionnée (72,12), nous nous attendrons les uns les autres à la porte du paradis. Mais comme nous n’y sommes pas encore, il y a quelques petits exercices pour faire attention les uns aux autres ! Voici les conseils de ce même chapitre que l’on nomme parfois le testament spirituel de St Benoît. Il y parle de la « grande ferveur d’amour » dont sont invités à se témoigner les frères : « ils s’honoreront mutuellement avec prévenance (cf. Rm 12,10) ; ils supporteront avec une très grande patience les infirmités d’autrui, tant physiques que morales ; ils s’obéiront à l’envi ; nul ne recherchera ce qu’il juge utile pour soi, mais bien plutôt ce qui l’est pour autrui ; ils s’accorderont une chaste charité fraternelle » (72,4-9)

Réunion et séparation : la parole

Commençons par le dernier conseil : la « chaste charité fraternelle ». La chasteté est une question de juste proximité et distance dans les relations avec les autres. Les deux sont importants : savoir se montrer proche, et savoir aussi respecter certaines distances. C’est le secret d’un amour sain, équilibré. La mesure est différente à chaque relation. Parfois cela se fait facilement, et d’autre fois c’est plus délicat.
Beaucoup de choses passent par la parole. C’est pourquoi dans la vie monastique, cloîtrée, St Benoît invite à faire particulièrement attention à l’usage de la parole, et à donner une place prépondérante au silence. Le premier mot de la Règle invite d’ailleurs à l’écoute : « Écoute, fils, les préceptes du Maître et prête l’oreille de ton cœur. » (Pr 1) L’écoute ne peut se faire que dans le silence, surtout quand il s’agit d’une écoute du Christ accomplie avec le cœur, comme c’est le cas ici. Mais cette attitude ne se limite pas à la relation à Dieu, elle doit investir la vie communautaire. Ainsi, après avoir donné ses instructions à l’abbé, un chapitre spécial est réservé à l’écoute en communauté : « Toutes les fois qu’il y aura dans le monastère quelque affaire importante à décider, l’abbé convoquera toute la communauté et exposera lui-même ce dont il s’agit. Après avoir recueilli l’avis des frères, il délibérera à part soi et fera ensuite ce qu’il aura jugé le plus utile. Ce qui nous fait dire qu’il faut consulter tous les frères, c’est que souvent Dieu révèle à un plus jeune ce qui est meilleur. » (3,1-3) On écoute les frères, et ce que Dieu dit à travers les frères. C’est pourquoi il s’agit d’une écoute du cœur. Proximité, donc, et rareté qui donne du relief à la parole. Un vrai, bon dialogue, est important partout, mais en particulier quand on vit cloîtré ensemble.
St Benoît n’insiste pas beaucoup sur la parole, même si on la voit intervenir dans des moments-clés. Par exemple en 7,44-48 sur l’accompagnement spirituel ; en 27,3 et 28,3 sur les frères qui ont fauté ; en 31,7.13.14 sur les besoins matériels ; en 42,10 et 53,8.9 sur l’accueil des hôtes. Et on pourrait citer d’autres passages.
Par contre il a réservé tout un chapitre sur le silence qui nous est peut-être moins familier. Le silence y est encouragé pour une raison qui semble assez négative : « Faisons ce que dit le prophète : ‘J’ai résolu de surveiller toutes mes voies, pour ne pas pécher par ma langue; j’ai placé une garde à ma bouche, je me suis tu et humilié, et je me suis abstenu même de parler de choses bonnes.’ (Ps 38,2.3). Le prophète nous montre par là que, si l’on doit quelquefois s’interdire de bons discours par amour du silence, à plus forte raison faut-il retrancher les paroles mauvaises pour éviter la peine due au péché. » (6,1.2) La parole peut faire mal, même quand on a de bonnes intentions. Il faut donc mettre le silence à la première place, et commencer par se taire (et réfléchir !) avant de parler. Une des valeurs du silence, outre l’écoute de Dieu et l’écoute mutuelle déjà mentionnées, tient à ce que la parole peut être dangereuse : « Il est écrit, en effet : ‘Tu n’éviteras pas le péché en parlant beaucoup ;’ (Prov 10,19) et ailleurs : ‘La mort et la vie sont au pouvoir de la langue.’ (Prov 18,21) » (6,4.5). Placer le silence en premier, c’est se donner une chance de ne pas tuer par sa langue. Et combien c’est important dans nos relations humaines !
À propos de silence et de relations, un grand combat de St Benoît se résume dans cet instrument pour bien agir : « ne pas être murmurateur » (4,39). Le murmure… Il revient une douzaine de fois (5,14.17-19 ; 23,1 ; 34,6 ; 35,13 ; 40,8.9 ; 41,5 ; 53,18) : à croire que c’est une spécialité des moines ! À moins que ce soit une spécialité de l’espèce humaine… Citons juste ceci : « Avant tout, que jamais n’apparaisse le vice du murmure, pour quelque raison que ce soit, ni en paroles, ni en un signe quelconque. » (34,6) Là aussi, c’est clair. L’importance de cet avertissement tient à ce qui est dit verset précédent : que tous les frères soient en paix (cf 34,5). La paix des relations est le trésor à conserver.

Respect mutuel

Certaines choses pourraient aller sans dire si nous étions tous saints. Mais comme ce n’est pas le cas, retenons cette maxime en or : « ils s’honoreront mutuellement avec prévenance ». « honorer », c’est avoir un très grand respect pour l’autre. St Benoît tient beaucoup au respect des personnes, de toutes les personnes. On trouve plusieurs « instruments » en ce sens au chapitre 4. Bien sûr « aimer son prochain comme soi-même (Mc 12,31 ; Lc 10,27) », mais aussi « ne pas tuer » : c’est effectivement important et bon de se le redire, car il y a beaucoup de manière de tuer l’autre… et parfois l’envie ne manque pas ! Plus loin : « honorer tous les hommes », donc pas seulement ceux qu’on aime bien, et il ajoute : « Ne point faire à autrui ce qu’on ne veut pas qu’on nous fasse » (bien sûr…). Puis, après beaucoup de bons conseils, une série intéressante : « Ne pas agir par envie. Ne pas aimer à contester. Fuir l’élèvement. Vénérer les anciens. Aimer les plus jeunes. Par amour du Christ, prier pour ses ennemis. Se réconcilier avant le coucher du soleil, avec qui on est en discorde. » (4,67-73) : autant de préceptes qu’il est bon de se répéter sans cesse dans toute communauté humaine, surtout si l’on vit les uns sur les autres.
S’honorer mutuellement, c’est aussi que chacun ait une place, soit à sa place… et reste à sa place ! St Benoît y est très attentif. Il consacre même tout un chapitre à ce sujet du rang dans la communauté. Il commence ainsi : « Les frères garderont dans le monastère la date que détermine leur entrée en religion, ou le mérite de leur vie et la décision de l’abbé. Celui-ci cependant ne troublera pas le troupeau qui lui est confié, et ne prendra aucune décision injuste comme s’il jouissait d’un pouvoir arbitraire. » (63, 1.2) L’ordre est très important pour St Benoît. Il ne s’agit pas seulement de se plier à une discipline, mais d’instaurer la paix dans les relations. Il est particulièrement attentif aux relations intergénérationnelles : « Les plus jeunes honoreront donc leurs anciens; et les anciens auront de l’affection pour leurs cadets. Lorsqu’ils se nommeront les uns les autres, il ne sera permis à personne de désigner quelqu’un par son seul nom, mais les anciens donneront aux plus jeunes le nom de Frères, et les plus jeunes à leurs anciens celui de Nonni, terme qui exprime la révérence à un père. Quant à l’abbé, parce qu’on croit fermement qu’il tient la place du Christ, il recevra l’appellation de Dominus et Abbé, non qu’il se l’arroge de lui-même, mais par honneur et amour du Christ. » (63,10-13) La manière dont on s’aborde, dont on s’interpelle et dont on se nomme ont à voir avec le respect que chaque personne mérite. Quelques chapitres plus loin on trouve d’autres aspects importants sur les relations : que nul ne prenne la défense d’autrui (69) ; que nul ne se permette de frapper qui que ce soit (70) ; qu’ils s’obéissent mutuellement (71). Il s’agit d’autant de manières de mettre de la douceur dans les relations.

L’obéissance mutuelle

Puisque nous évoquons l’obéissance, revenons à un précepte cité plus haut : « ils s’obéiront à l’envi » (72,6). L’obéissance n’a pas bonne presse, mais elle est essentielle à la paix des relations. Elle est signe de respect. Il ne s’agit pas de plier aux caprices des autres, ni de soumettre les autres à mon pouvoir. Il s’agit d’ouverture aux autres, d’écoute mutuelle, d’attention dans le concret du quotidien à donner de la joie ou à éviter de la peine à ceux qui nous entourent. Toute la sensibilité de St Benoît est investie et donnée en partage dans ce conseil. Comme exemple concret de l’attention aux autres voici une demande concernant l’oratoire, mais qui est transposable dans d’autres cas : « Après l’Oeuvre de Dieu, tous les frères sortiront dans un profond silence, et ils auront pour Dieu la révérence qui lui est due ; de la sorte, si peut-être un frère veut y prier en son particulier, il n’en sera pas empêché par l’importunité d’autrui. » (52,2.3) Peut-être s’agira-t-il ailleurs de marcher doucement ou modérer le volume de sa musique pour ne pas réveiller bébé qui dort…
Cela peut s’incarner dans des domaines aussi prosaïques que l’attention aux choses matérielles. Il est demandé au cellérier (chargé des sous et du travail) de considérer « tous les objets et tous les biens du monastère comme les objets sacrés de l’autel. » (31,10) Et au chapitre suivant, « si quelqu’un traite les objets du monastère avec malpropreté ou négligence, il sera réprimandé » (32,4). C’est important car « tout sera commun à tous » (33,6) est-il encore dit. Et encore un peu plus loin il est dit que le frère de service à la cuisine « remettra au cellérier, propres et en bon état, les objets de son office. » (35,10) : il faut donc faire la vaisselle pour que les relations soient plus faciles ! Décidément, St Benoît aime l’ordre. C’est important dans une vie cloîtrée, nous y reviendrons.

Prendre soin des fragilités

Un autre aspect important du vivre ensemble est de prendre soin des fragilités : « ils supporteront avec une très grande patience les infirmités d’autrui, tant physiques que morales » (72,5). Nous sommes tous concernés, car tout homme a des fragilités dont il a besoin qu’on prenne soin, même certaines personnes qui pourraient se croire plus endurcies. Être endurci est précisément une fragilité… A ce sujet, il vaut la peine de citer le chapitre sur la distribution du nécessaire à chacun : « Comme il est écrit : ‘On partageait à chacun selon ses besoins.’ (Ac 4,35) Par là, nous ne disons point qu’on fasse acception des personnes -ce qu’à Dieu ne plaise -mais qu’on ait égard aux infirmités. Celui qui aura besoin de moins, rendra grâces à Dieu et ne s’attristera point ; celui à qui il faut davantage, s’humiliera et ne s’élèvera point à cause de la miséricorde qu’on lui fait. Ainsi tous les membres seront en paix. » (34,1-5) Ce principe d’adaptation aux personnes est très souvent appliqué et rappelé par St Benoît. C’est très important. La raison en est la paix de chacun. Cette conception de la justice n’est pas facile à intégrer, car il y a toujours un enfant au fond de nous qui crie : « c’est pas juste ! ». Il est d’ailleurs demandé à l’abbé de ne pas aimer l’un plus que l’autre (2,16-22), ce qui nécessite de savoir s’adapter à chacun (2,31.32) : tâche très délicate dans laquelle il doit être le premier de cordée pour entraîner la communauté.
Le secret intérieur de cette attitude est sans doute dans ce que demande à l’abbé, mais qui peut s’appliquer à tous : « Il aura toujours devant les yeux sa propre faiblesse, et se souviendra qu’il ne faut pas broyer le roseau déjà éclaté. Et par là nous n’entendons pas qu’il puisse laisser les vices se fortifier, mais qu’il les détruise avec prudence et charité, en adaptant les moyens à chaque caractère, comme nous l’avons déjà expliqué. Il s’efforcera plus à se faire aimer qu’à se faire craindre. » (64,13-15) Tout cela est particulièrement vrai dans son attitude envers les moines qui ont fauté, aux chapitres 27 et 28.
Les infirmités sont aussi physiques. Les malades, les vieillards et les enfants, ainsi que les pauvres : toutes ces personnes doivent faire l’objet d’une attention particulière. Citons juste le début du chapitre sur les malades : « On prendra soin des malades avant tout et par-dessus tout. On les servira comme s’ils étaient le Christ en personne, puisqu’il a dit : ‘J’ai été malade et vous m’avez visité’ (Mt 25,36), et ‘ce que vous avez fait à l’un de ces petits, c’est à moi que vous l’avez fait.’ (Mt 25,40). De leur côté, les malades considéreront que c’est en l’honneur de Dieu qu’on les sert. Aussi ils ne mécontenteront pas par des exigences superflues les frères qui les servent. Éventuellement, il faudrait cependant les supporter avec patience, parce qu’il en revient plus de mérite. L’abbé veillera donc avec un très grand soin à ce que les malades ne souffrent d’aucune négligence. » (36, 1-6) Il en va de même pour les pauvres qui frappent à la porte du monastère.

Une autorité à ménager

Nous avons déjà croisé plusieurs fois l’autorité dans la personne de l’abbé. Mission difficile. Lui aussi a besoin d’être aimé, cela fait partie du vivre ensemble en paix. C’est pourquoi St Benoît inscrit dans son « testament » : « ils aimeront leur abbé avec une charité sincère et humble » (72,10). Lui aussi a droit et surtout besoin d’être considéré comme une personne et aimé avant d’être abordé avec l’étiquette de sa délicate fonction.

III – Vivre ensemble « CLOÎTRÉS »

Continuons à aller dans le concret. Vivre bien, et vivre ensemble, cela nécessite de s’organiser. Nous avons déjà vu que St Benoît aimait l’ordre, car il a constaté que c’était facteur de paix. Mais il sait aussi arrondir les angles, vivre cet ordre avec souplesse : c’est tout aussi important. Voyons maintenant quelques mesures pratiques pour mettre de l’ordre dans la vie en commun.

Un temps structuré

Il y a déjà deux articles sur le sujet : Apprendre à sanctifier le temps, sur le temps quotidien, et L’année bénédictine : une célébration pascale, sur le temps annuel. Le premier article traite de la prière quotidienne, qui structure notre vie monastique. Le second est plus large. Il ne sert pas de redire ici ce qui est développé ailleurs, mais il convient tout de même d’en transmettre quelques principes.
Ce qui structure le temps du moine est la prière : c’est sans surprise. Cette prière commence pour nous avant le lever du soleil, et elle reçoit son rythme du cycle de la lumière. On marque les moments importants du lever et du coucher du soleil, c’est-à-dire le début et la fin de la journée active. La mystique rencontre là des raisons pratiques. Par exemple, les Laudes « doivent être chantées au point du jour. » (8,4), ça c’est de la mystique : on se rappelle que le Christ est la vraie lumière, et on le célèbre. Mais par ailleurs, les Vêpres sont généralement célébrées au coucher du soleil, pour la même raison. Mais durant le Carême le repas est après les Vêpres. Donc on fait un choix pratique : « les Vêpres elles-mêmes seront célébrées de façon que l’on n’ait pas besoin de la lumière d’une lampe durant le repas, mais que tout puisse encore être fini à la clarté du jour. » (41,8). Notre monde moderne a perdu ce sens du cycle de la lumière, qui reste pourtant inscrit dans nos racines corporelles et psychiques. Les raisons pratiques ont envahi le poids symbolique. Ne serait-il pas temps de retourner à la recherche de cette symbolique ? Car nos heures, nos jours, nos mois, nos années, sont toujours déterminés par le mouvement des astres…
Les repas structurent la journée de manière un peu plus complexe, car il y a des variations en fonction des périodes de l’année. Il n’y en a pas toujours le même nombre, et ils ne sont pas toujours pris à la même heure. Cependant ils restent tout à fait structurants, car ils réunissent la communauté au même endroit au même moment. Et tous les moines sont tenus d’y être à l’heure, comme à l’office : la réunion des frères ne supporte pas de retard. Ce n’est pas pure discipline, mais, encore, respect mutuel, amour fraternel. Le communautaire prime sur l’individuel. Le tintement de la cloche pourvoit à l’appel, et c’est un service sacré !
St Benoît donne un poids particulier aussi à la nuit. Temps du repos, elle est aussi celui du silence : « Les moines doivent s’appliquer au silence en tout temps, mais principalement pendant la nuit. » (42,1). Chacun est invité à se retrouver dans son intimité personnelle, à se recueillir en plus de se reposer. La journée du moine commence tôt, et nous allons voir qu’elle est active et bien remplie. Le contraste de la nuit avec la journée, voulu par Dieu comme nous l’enseignent les premières lignes de la Genèse, est très important pour le rythme des personnes. Si le jour est un temps de création, la nuit est un espace de re-création.

Des activités variées

« L’oisiveté est ennemie de l’âme. Les frères doivent donc consacrer certaines heures au travail des mains et d’autres à la lecture des choses divines. » (48,1) : c’est ainsi que commence le chapitre sur le travail, et au fond tout est dit en une phrase. Tout résumer en une sentence introductive est une méthode qu’on rencontre assez fréquemment dans la Règle. Il faut donc de la diversité dans une vie cloîtrée. Non seulement la vie se partage entre la prière et le travail, « ora et labora », selon une devise (un peu tardive, mais déjà ancienne) des bénédictins, mais le travail lui-même se partage en deux sortes d’activités. Chaque jour, St Benoît préconise donc une alternance de lecture et de travail manuel, avec même une sieste prévue, durant laquelle on peut aussi lire. Le temps consacré à chaque activité dépend de la saison ou du temps liturgique. Par exemple il y a plus de lecture prévue pendant le Carême, et plus de travail manuel durant l’été. Et le dimanche « tous vaqueront à la lecture, excepté ceux qui sont employés à divers offices. » (48,22)
St Benoît ayant l’expérience de la pâte humaine, il sait que nous sommes inégaux devant le travail : certains préfèrent la lecture, et d’autres le travail manuel. Mais il tient à ce que chacun ait un peu de tout. Donc, en cas de surcharge estivale, il console les intellos de cette manière : « Si les frères se trouvent obligés, par la nécessité ou la pauvreté, à travailler eux-mêmes aux récoltes, ils ne s’en affligeront point ; c’est alors qu’ils seront vraiment moines, lorsqu’ils vivront du travail de leurs mains, à l’exemple de nos pères et des Apôtres. » (48,7.8) Et puis en temps de Carême où la lecture plus longue peut en indisposer certains, il prend des précautions : « On ne manquera pas de nommer un ou deux anciens, qui parcourent le monastère aux heures consacrées à la lecture. 18 Ils examineront s’il ne se trouve pas quelque moine paresseux, perdant son temps à l’oisiveté ou au bavardage, au lieu de s’appliquer à la lecture, et qui ainsi, non seulement se nuit à lui-même, mais dissipe les autres. » (48,17.18) Ce n’est pas de l’autoritarisme, mais la conscience du besoin et du bienfait de la lecture.
Ces travaux sont cependant adaptés à chacun. À propos du travail des champs, il préconise « que tout néanmoins se fasse avec modération, par égard pour les faibles. » (48,9). Et à propos de la lecture, il prévoit aussi une parade pour les réfractaires ou les malades : « Si toutefois quelqu’un était si négligent et paresseux qu’il ne voulût ou ne pût ni méditer ni lire, on l’appliquera à quelque travail, afin qu’il ne demeure pas oisif. » (48,23). Donner du travail à chacun est donc tout un art d’adaptation.

Ni trop ni pas assez d’activités

Non seulement l’abbé doit veiller au type de travail qu’il donne, mais il lui est recommandé aussi de donner du travail avec mesure, notamment pour les malades : « Quant aux frères malades ou délicats, on leur donnera tel ouvrage ou métier qui les garde de l’oisiveté, sans les accabler ni les porter à s’esquiver. L’abbé doit avoir leur faiblesse en considération. » (48,24.25). Il est important de se garder de l’oisiveté, car si on ne travaille pas de ses mains, on risque de « travailler du chapeau ». C’est-à-dire que quand on n’est pas assez occupé, les idées commencent à tourner dans la tête, et elles ne sont pas forcément bonnes : idées noires, murmures, ou grande inventivité dans la perte de temps, voire les bêtises. C’est connu.
Mais la suractivité est aussi nocive que l’oisiveté. Et, quoi qu’on en pense souvent, l’hyperactivité guette aussi les moines qui n’ont jamais assez de temps pour le travail entre deux offices. Apparemment il y avait déjà un risque au temps de St Benoît, puisqu’à plusieurs endroits il recommande qu’on aide les frères surchargés de travail. On le trouve par exemple au sujet de la cuisine de l’hôtellerie (très imprévisible), et c’est suivi d’une considération générale : « On leur donnera, si besoin, des aides afin qu’ils travaillent sans murmure. Quand ils ne seront pas suffisamment occupés, ils s’emploieront à d’autres ouvrages qu’on leur indiquera. On observera cette règle, non seulement pour eux mais pour tous les offices du monastère, en leur accordant des aides selon leur besoin et en les envoyant à d’autres devoirs lorsqu’ils ne seront pas occupés au leur. » (53,18-20) Le temps est sacré au monastère, et au fond dans toute vie. Il s’agit de le vivre dans la paix en ne le surchargeant pas, et de le rendre fécond en ne laissant pas de vide.
« Mesure » est donc encore une fois le maître mot bénédictin, et c’est au cœur de la mission de discernement de l’abbé : « Dans ses commandements, il sera prévoyant et circonspect. Dans les tâches qu’il distribuera, soit qu’il s’agisse des choses de Dieu, soit de celles du monde, il se conduira avec discernement et modération, et se rappellera la discrétion du saint patriarche Jacob, qui disait : ‘Si je fatigue mes troupeaux en les faisant trop marcher, ils périront tous en un jour.’ (Gn 33,13) Imitant donc cet exemple et d’autres semblables de la discrétion, cette mère des vertus, qu’il tempère tellement toutes choses que les forts désirent faire davantage et que les faibles ne se dérobent pas. » (64,17-19)

Petite conclusion

Vivre ensemble cloîtrés est donc tout un art. Au fond, les « règles sanitaires spirituelles » sont assez simples à comprendre, mais comme souvent elles le sont moins à mettre en œuvre. Espérons que cette petite présentation du génie de St Benoît puisse nous aider à vivre mieux. Laissons-lui la parole pour terminer avec le dernier chapitre de sa Règle. « Cette Règle, que nous venons d’écrire, il suffira de l’observer dans les monastères pour faire preuve d’une certaine rectitude morale et d’un commencement de vie monastique. […] Qui donc que tu sois, qui te hâtes vers la patrie céleste, accomplis, avec l’aide du Christ, cette toute petite Règle, écrite pour les débutants. Cela fait, tu parviendras avec la protection de Dieu, aux plus hautes cimes de la doctrine et des vertus, que nous venons de rappeler. » (73,1.8.9)